Archive for janvier, 2018

S’il y a bien une chose que j’ai observée avec les années, c’est que le management a pris pas mal de retard au fil des décennies. Globalement, il est resté le même en presque un siècle ! Un congrès à Malaga auquel j’ai participé la semaine dernière m’a cependnat permis de découvrir que certaines entreprises se donnaient les moyens d’innover dans le domaine… et que les résultats obtenus en valaient largement la peine. Un intervenant, notamment, nous a présenté trois exemples de management unique qui m’ont médusé, à tel point que je voulais en parler ici.
Chez HCL Technologies, en Inde, les employés ont en effet la possibilité d’exposer leurs craintes via un site interne titré « U&I » (vous et moi) où les membres de la direction s’engagent à répondre ; quitte à admettre leur ignorance. Une démarche courageuse mais très profitable. Construire un lien de confiance implique en effet de passer par une étape inévitable (mais plutôt difficile, certes) au sein du management : approuver l’expression des doutes, peurs ou critiques. L’idée est ici de canaliser les ressentis négatifs plutôt que de les laisser se propager dans les couloirs, autour de la machine à café… ou chez les clients. Chez WL Gore, aux Etats-Unis (8000 salariés), les nouvelles recrues bénéficient de leur côté de quelques semaines pour découvrir tous les projets et nommer les équipes dans lesquelles elles voudraient travailler. Les équipes adoptées ont le droit d’approuver ou écarter la candidature. Une bonne manière de créer des équipes cultivant une bonne entente, essentielle pour une communication efficace. Cette coutume souligne ouvertement les deux éléments du plaisir au travail, soit le travail lui-même mais surtout l’appartenance à un groupe où l’on se sent à sa place. En France, chez Orange (seul opérateur qui n’a pas été impacté par le débarquement de Free – hasard ou autre chose ?), les employés peuvent enfin exposer librement leurs idées via un système d’innovation sociale nommé IdClic. Le processus permet à n’importe quel employé de déposer une idée sur une plateforme d’engagement. L’idée est alors étudiée par des experts volontaires (environ 5000). Si elle n’est pas archivée, elle fait l’objet d’une étude de faisabilité avec une estimation des gains nets. Une fois mise en application, elle peut être par la suite étendue au niveau national. Le détenteur de l’idée se voit de son côté décerner des talents (une monnaie virtuelle) qu’il peut utiliser dans une boutique dédiée. Depuis 2007, 1/3 des employés ont déposé une idée (soit environ 122000 idées déposées), et 10 % ont pu être déployées, générant ainsi de substantielles économies qui n’auraient pu être occasionnées autrement. Ce congrès à Malaga a été une révélation : il m’a révélé que de grandes innovations attendent le management, et que certaines entreprises s’en sont emparées à bras le corps. Mais pour une société qui prépare l’avenir, combien s’appuient encore sur un management dépassé ? Et combien subiront l’impact de ce manque d’innovation ? Davantage d’information sur l’organisation de séminaire en Espagne en surfant sur le site web de l’organisateur.

On dit que la nature a horreur du vide. La politique aussi sans doute. Comment pallier l’absence totale d’engagements concrets de la part des principaux gouvernements du monde pour lutter contre le réchauffement du climat (la COP 23 qui vient de s’achever à Berlin révèle le grand bluff que fut la COP 21 de Paris en 2015) et les atermoiements européens (et au final le renoncement) pour interdire le glyphosate ? Comment dissimuler l’absurdité (au-delà de son cynisme) du macronisme qui brise le travail, appauvrit les pauvres et enrichit les riches ? Par quel bout reconstruire une alternative politique quand la dialectique du eux et du nous supplante la complexité des rapports sociaux ? Les réponses à ces questions sont étonnantes et déroutantes. La presse authentiquement de gauche se livre à une bataille d’une violence extrême sur fond de rapport entre liberté et laïcité, avec le risque permanent de glisser vers une assimilation entre une religion (islam), un projet politique de soumission de l’État de droit (islamisme) et une entreprise criminelle (terrorisme). Cette assimilation, lorsqu’elle est patente, conduit à une confusion entre la libre critique de toute religion et celle des croyants euxmêmes, à qui le respect est dû. Et tout cela se déroule dans une ambiance de vacuité médiatique, au moment où sévit la plus grande crise systémique du capitalisme, dont la mondialisation de celui-ci est grandement responsable. La mondialisation du capital rend dépendants les uns des autres les systèmes productifs autour des « chaînes de valeur », elle entrelace les systèmes bancaires et financiers, elle affaiblit les capacités d’action autonome des États-nations, et elle construit des espaces politiques élargis mais sans gouvernement véritablement représentatif des aspirations des populations (à l’instar de l’Union européenne). Sur ce sujet, l’économiste Dani Rodrik parle de « triangle d’incompatibilité institutionnelle » entre 1) un processus politique démocratique, 2) une mondialisation touchant les échanges économiques et le travail, 3) un espace politique à l’échelle d’un État-nation. La réunion de deux côtés du triangle empêche le troisième. Pourtant, les revendications de souveraineté populaire, de droit à l’autodétermination, d’indépendance, même à des échelons locaux ou régionaux, deviennent de plus en plus précises. S’agit-il d’un antidote à une globalisation aveugle et violente ? Ou bien d’un élément susceptible d’affaiblir encore davantage les États et surtout leurs systèmes sociaux et fiscaux, aggravant ainsi les disparités, les inégalités, voire les discriminations et la xénophobie ?

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